SEMINAIRE Aristote, euromed audiovisuel. 2002/2003
Premier Bilan
Aristote a réuni pour sa première édition, des profils de jeunes professionnels très différents ce qui a fait sur le terrain à la fois la richesse des échanges mais aussi en termes de pédagogie et d’accompagnement des talents et des projets, la grande difficulté de la mission qui nous a été confiée à Gilles Cahoreau et à moi même.
En gros, les projets étaient à des stades très différents d’avancement au départ, les auteurs avaient des expériences en matière d’écriture et des expériences professionnelles tout court très différentes, plusieurs pays d’origine étaient représentés, certains auteurs n’aspiraient qu’à l’écriture d’autres visaient plutôt la réalisation mais se devaient de passer par l’écriture pour y parvenir, enfin les motivations professionnelles des participants n’étaient pas équivalentes, autant de paramètres demandant une souplesse de la part des tuteurs.
Or, nous avons eu la chance qu’à Beyrouth l’alchimie du groupe soit optimale, ce qui nous a permis de travailler sur ce facteur pendant un an dans l’harmonie et la compréhension mutuelle.
Les rôles entre Gilles et moi-même se sont naturellement répartis Gilles étant plus spécifiquement dédié à l’approche dramaturgique des travaux, moi ayant le regard de la faisabilité ce qui n’empêchait pas de donner un avis sur l’état du script.
Les experts à Marrakech comme à Naples venant compléter notre approche.
Les progrès des participants ont été stupéfiants, si on considère qu’en général dans les processus d’écriture hors formation, 50 à 60 %, dans le meilleur des cas, des écritures vont jusqu’au stade du scénario, nous pouvons dire que nous avons gagné notre pari. Et ce, d’autant que certains sont arrivés avec un synopsis et que d’autres étaient en mauvaise posture sur des scénarios bloqués depuis quelques mois au moins.
Comme l’a souligné Isabelle Huige qui a l’habitude de lire, la qualité de ce qu’elle a lu en juillet dernier dans le cadre d’Aristote est au moins égale voir supérieure à ce qu’elle reçoit des professionnels (reconnus comme tels) chez Arte.
Sans faire d’autosatisfaction ni congratuler le groupe à outrance, je considère, pour ma part, que avec le peu de moyens et les handicaps que nous avions avec un groupe qui ne se connaissait pas et ne pouvait se voir en dehors des sessions, nous avons fait un bon travail avec des participants qui ont su tirer un bon profit de ce programme.
Reste beaucoup de choses à améliorer bien sûr et comme toujours. Nous avons tous sans doute des suggestions, j’en ai émis une, en particulier, qui manifestement n’a pas été bien comprise telle que je l’ai formulée à Naples, le choix des projets comme étant à proprement parlé méditerranéens et ce qu’ils viennent du Sud ou du Nord de l’Europe.
Le
dénominateur devant être sans aucun doute la Méditerranée, mais pas la
Méditerranée comme théâtre des opérations, simple décor qu'on pourrait
éventuellement changer sans changer la dramaturgie d'un scénario, non la
Méditerranée comme décor actif... lié à une culture, une histoire etc...
La satisfaction la plus grande est de se dire que pour la majorité des projets, quelle que soit l’étape d’écriture à laquelle ils sont arrivés, leur projet est possible à placer sur le marché.
De mon point de vue, le prolongement le plus utile d’ARISTOTE aujourd’hui serait de mettre en place une infrastructure qui permette d’accompagner de façon cohérente les projets sur le marché et les proposant ou en proposant les talents de scénaristes à l’euro-méditerranée, ce que cine-europa tente aussi par le biais de la base de données. Ce suivi a certes un coût, mais il est essentiel pour prolonger le travail entrepris et éviter que les auteurs soient au terme de cette expérience qui ouvre des perspectives, à nouveau isolés.
Je reviens juste projet par projet sur le point concernant la visibilité sur le marché et quelques commentaires :
A ce stade de travail difficile d’exposer ton travail pourtant ce que tu as accompli est exceptionnel. Tu avais au départ que quelques pages, un vague sujet qui était plus une thématique ou alors un sujet de court métrage… et tu as réussi à construire une promesse de Lm dans le genre le plus dur à écrire la comédie… alors que si tu te souviens tu ne te pensais pas capable d’écrire plus de 30 pages.
A mon avis si tu restes motivée par ce projet, tu n’es pas loin d’un scénario que tu puisses présenter
On en reparle quand tu veux Zeina
En dehors de ton synopsis qui pour des raisons mystérieuses reste opaque, le scénario lui a une force étonnante et une originalité que tu as su préserver. Cette originalité était ta faiblesse à Beyrouth car on ne comprenait rien de ce que tu voulais faire, tu as réussi à te faire comprendre, à écrire un film et à préserver son atypisme…
Désolée de t’avoir manqué à Casa mais pour une fois j’étais en vacances…
Comme l’écrit Gilles et comme nous en avons parlé « Le scénario est abouti et il ne serait pas bon de le réécrire tant que le projet n’aura pas trouvé son metteur en scène »
Tu as été très ambitieuse quand, comme premier Lm, tu as voulu faire un film choral avec une construction pas facile mais tu t’en es très bien tirée. Ta maîtrise actuelle de l’écriture te donne la possibilité de travailler sur les films d’autrui d’autant que toi (et c’est formidable) c’est l’écriture scénaristique qui t’intéresse vraiment. Comme tu le sais, je donne ton nom dès que je peux si tu ne dois pas retoucher ce script, en revanche continue à écrire autre chose comme tu l’as fait cette année.
Ta capacité à analyser ton propre travail t’a permis de faire la meilleure analyse qui soit de ta dernière version à Naples et je te souhaite de trouver « ta » version plus poétique et moins explicative très vite. Ce qui est clair, c’est que ta plume est sûre, tu sais écrire et il faut que tu prennes confiance en toi dans ce domaine, beaucoup de réalisateurs libanais ont besoin de ce savoir faire…
Après le film que tu nous as montré à Naples et la dernière version de ton script il semble que tu sois sur les rails. Comme nos discussions ont beaucoup porté sur le profil de producteurs vers lesquels tu dois te diriger et que j’ai émis des avis assez francs à ta demande, je ne les retranscris pas ici pour ne faire de tord à personne, mais tu peux revenir vers moi au vu de ce qu’ils t’ont concrètement proposé si tu en sens le besoin.
A Marrakech, j’ai cru en fonction de ce que tu avais alors dans les mains et de ton attitude que tu n’y arriverais pas… et puis quelques mois plus tard, ton scénario a fait un bon considérable et ton analyse de réalisateur, que tu seras pour ce projet et pour d’autres dont j’ai pu par ailleurs apprendre l’existence, s’est affinée. Bravo, je pense que ce projet est viable mais qu’il ne peut être ton premier LM, comme je crois que, de toutes façons, ce n’est pas ton souhait, tout va bien, donne des nouvelles si je n’en ai pas par ton producteur.
Projet : Melodrama
Voici le seul projet que je connaissais avant Aristote et sur lequel je me désespérais, tu avais tout déjà il y a un an, Hani, le sujet, le ton, le talent et pourtant tel Penelope tu passais ton temps à défaire ce que tu venais d’écrire. Gageons que ce que t’a donné Aristote c’est la méthodologie et l’énergie pour aller jusqu’au bout, puisque voilà, à quelques retouches près, le script est là fort des qualités de tes Cm et d’une humanité revigorante. Tu as aussi des producteurs compétents, je sais qu’il vous reste à réunir le financement et que ce n’est pas simple même si désormais tu peux leur rendre un scénario convaincant.
Bon tournage…
A Beyrouth il y a un an, tu avais peu de choses dans les mains, et surtout pas vraiment conscience de l’importante de ce sujet pour toi. Et puis, tu doutais de pouvoir le coucher sur le papier, nous aussi nous doutions, en revanche nous ne doutions pas qu’il y avait un sujet et des personnages forts. Derrière les maladresses, des vraies idées de mise en scène… Tu ne sais toujours pas vraiment écrire, mais tu l’as fait, nous avons désormais un script sur lequel tu vas retravailler et qui va sans doute être améliorer par un scénariste, mais tu as mis ton film sur le papier et c’est très bien… La façon que vous avez eue avec Hani de vous lire et relire et de vous soutenir est une méthode de travail qui vous a réussi et qu’il est possible de prolonger au delà d’Aristote bien sûr, l’un et l’autre pensez-y !
Ne te noies pas dans la pub, n’oublies pas où sont tes priorités !
En ce qui me concerne, je pense que la bonne maitrise du développement est de pouvoir remettre en question quelques choix et orientations auxquels on a cru à un moment donné, mais qui à tord ou à raison, ne tiennent plus la distance. Donc que tu sois le seul à avoir moins de pages à l’arrivée qu’au départ, ne me semble pas être un échec au contraire. Seule la motivation qui semblait te manquer à Naples pour ton projet dans sa nouvelle forme, m’a troublée. Mais peut-être te fallait-il douter encore pour savoir définitivement ce que tu voulais remettre sur l’établi ?
Quelque soit l’originalité du sujet qui est le tien et la qualité de ton pitch désormais, l’incroyable et vivifiante liberté de ton et d’idées, je pense que d’un point de vue technique scénaristique tu n’as pas su tirer d’Aristote les bénéfices. Que ce soit désagréable à lire et à entendre ou non, il faut vraiment que tu saches que ton texte n’est pas lisible en l’état et en prendre conscience, plutôt que de justifier cette forme scénaristique bizarre en laissant planer le doute que tes lecteurs n’ont pas été assez attentifs ne te mènera nulle part. Il y aura toujours des gens pour te dire que c’est lisible et bien, demande toi seulement si c’est l’avis de professionnels. A part cela je pense que ton originalité et ton humour avec un peu de rigueur et peut-être un travail avec un complice en écriture peut donner un bon scénario finançable car universel même si très libanais.